jeudi, avril 20, 2006

QUAND LA JUSTICE CACHE LA JALOUSIE

La France malade de jalousie :le scandale VASARELY
Par Bruno FINEL

En France mieux vaut être délinquant ou terroriste moyen-oriental que citoyen au dessus de tout soupçon. Depuis une quinzaine années, un éminent constitutionnaliste, ancien collaborateur d’un président français et accessoirement conseiller de plusieurs chefs d’Etats étrangers l’a appris à ses dépens. A Paris, on laisse en liberté des mafieux récidivistes, on déroule parfois le tapis rouge à des Palestiniens auteurs d’attentats meurtriers, on rechigne à mettre sur liste noire une organisation comme le Hizbollah libanais mais on condamne un individu qui a formé toute une génération de juristes français étrangers.

C’est la cabale dont est victime depuis 1993 Charles Debbasch aujourd’hui sous le coup d’un mandat d’arrêt. Un vrai calvaire.
M. Debbasch est un personnage à la réussite fulgurante. Une figure d’Aix en Provence, cette charmante ville du sud de la France dont il devient le plus jeune président de l’université de Droit. Une faculté de haut niveau où est formé l’élite des avocats et magistrats français. Parallèlement à cette fonction, il assure le rôle de conseiller auprès de certains responsables politiques de droite et au sein de groupes de presse en France.
Sa réputation de constitutionnaliste dépasse les frontières de la ville et du pays puisqu auteur de cinquante ouvrages traduits en plusieurs langues,’il est régulièrement sollicité par des Etats étrangers pour la rédaction de leur nouvelle constitution.

Charles Debbasch est également un excellent pianiste et un amateur d’art averti. Une passion qu’il cultive et qui, hasard des rencontres, le met en contact avec la Fondation Victor Vasarely.
Vasarely est un artiste tout à fait singulier dans l'histoire de l'art du XXème siècle. Accédant à la notoriété de son vivant, il se distingue dans l'art contemporain par l'aboutissement exceptionnel auquel il a conduit la peinture abstraite géométrique, sous le nom de cinétisme.

Toute son œuvre s'inscrit dans une grande cohérence, de l'évolution de son art graphique jusqu'à sa détermination pour promouvoir un art social, accessible à tous.
L’artiste, comme c’est souvent le cas, décide de créer sa fondation. Mais l’homme s’avère être un piètres gestionnaire. Après quelques déconvenues, il demande à l’Université d’Aix en Provence d’assurer la direction de cette structure. Charles Debbasch est alors sollicité. La mission est bénévole mais passionnante pour le juriste. Actions de mécénat, coopérations avec les musées français et étrangers. Debbasch ne ménage pas son temps pour faire de la Fondation Vasarely une structure dynamique au seul service de l’art.
Mais l’homme qui a formé entre autres le souverain marocain, Mohamed VI, le prince Norodom Ranariddh du Cambodge et quantité de dirigeants français et internationaux est bien mal récompensé.

Soucieux de récupérer certaines toiles données à des musées, ambitionnant de mettre la main sur une partie de l’œuvre dont la valeur est inestimable, certains des héritiers Vasarely décident de s’attaquer au principal responsable de la Fondation, Charles Debbasch. Et les accusations pleuvent. Debbasch a volé certaines toiles, Debbasch se serait servi de l’argent de la Fondation pour à des fins personnelles, affirment les proches du peintre.

En quelques mois, le juriste compétent et reconnu devient un vulgaire délinquant qui a utilisé la prestigieuse Fondation comme une « Piggy Bank ».

L’affaire fait la Une des journaux en France. Charles Debbasch, qui n’a jamais refusé de se rendre à une convocation de justice se trouve devant la Faculté avec ses avocats pour porter plainte contre le magistrat instructeur il est attaqué par des gendarmes et battu devant ses étudiants. Défendu par eux, il se réfugié à la Faculté et déclare qu’il se rendra à toute convocation régulière. Mais la justice préfère user de la force. Au terme de 24h d’un siège absurde, un escadron de gendarmes casqué et armés jusqu’aux dents envahit l’Université et enlève le professeur de droit. Il est aussitôt incarcéré à la prison des Baumettes à Marseille. Il sera libéré au motif que sa détention est nécessaire à la recherche de la vérité. Mais dans le même temps la justice aixoise libère Francis le Belge le principal parrain du milieu marseillais. Au bout de trois mois de détention, le doyen Debbasch libéré faute de charges reprend ses cours sous les applaudissements de ses étudiants. ………….
Mais les problèmes ne font que commencer. D’instructions en procès de jugements en appels, Charles Debbasch est l’objet d’un véritable lynchage. Lynchage orchestré par des juges qu’il a parfois formés à l’Université d’Aix. Mais pas uniquement par eux. La grande bourgeoisie de la ville, les milieux politiques locaux règlent leurs comptes. La jalousie, ce mal français, fait son œuvre lentement mais sûrement.

Dés le départ, l’ « Affaire Vasarely » prend une dimension internationale car Charles Debbasch est le conseiller juridique du Président du Togo (un petit pays d’Afrique de l’Ouest). A l’hostilité de certains milieux en France se greffe des règlements de comptes politiques entre partisans et adversaires du leader togolais. Et c’est Debbasch qui en fait les frais.
La presse se déchaîne, le gouvernement français fait pression sur le Togo pour qu’il se débarrasse de cet « encombrant conseiller », de ce « marabout blanc ». Fidèle en amitié, le président Eyadema ne cèdera jamais.
Le paroxysme de ce scandale français est atteint au mois de février 2005. Le président du Togo meurt brutalement. Charles Debbasch saute dans un avion pour rejoindre Lomé, la capitale togolaise. Aux côtés des institutions de la transition, il conseille et recommande des solutions de sortie de crise. Une assistance que certains ont critiqué mais qui permettra au Togo de retrouver la stabilité.Coïncidence, à la même époque, la justice française condamne une nouvelle fois Charles Debbasch. Deux ans de prison ferme et une amende. Comme l’intéressé se trouve à Lomé, un mandat d’arrêt est délivré. Il reste deux options au constitutionnaliste : rentrer en France pour y être arrêté ; demeurer au Togo. Il choisit la deuxième option bien décidée toutefois à se battre pour obtenir justice. Car entre-temps les héritiers Vasarely ont profité du désastre judiciaire pour dépouiller la Fondation de plusieurs millions de dollars de toiles.
Charles Debbasch est certes meurtri devant un tel hallali mais résolu à se battre. Pour son honneur et celui de sa famille. Il poursuit la justice française pour faute lourde. Il achève la rédaction d’un ouvrage où il dira toute sa vérité. Et certains en France risquent d’en prendre plein la figure.Si critique à l’égard du système judiciaire américain, les Français devraient cesser de se regarder dans le miroir. L’affaire Vasarely est l’illustration d’une justice malade.