Si je m’interroge sur les
raisons de mon choix pour l’éducation nationale, après une carrière de plus de
cinquante ans -et encore partiellement active-
je ne vois que l’admiration que
j’éprouvais pour l’institution scolaire et ses serviteurs.
La passion d’apprendre puis
celle d’enseigner je les ai contractées au contact de l’extrême qualité de mes
professeurs .Certes, il en était de plus talentueux que d’autres, de plus respectés
et de plus recherchés Mais tous avaient la foi dans leur vocation au service de
la République laïque et impartiale, tous s’astreignaient à garder un
comportement à la hauteur de leur mission, tous veillaient à être justes dans
leurs appréciations .Ils cultivaient le mérite comme valeur suprême.
Il y avait sans doute des
élèves plus rétifs que d’autres à la discipline scolaire mais la communauté
éducative disposait des moyens de les guider sur le droit chemin et le cas
échéant –rarement-de les sanctionner.
Les professeurs étaient
appuyés dans leur mission par les parents qui reconnaissaient leurs vertus et
acceptaient leurs verdicts.
L’ensemble de la société plaçait
l’estime pour les enseignants au-dessus de toutes les autres.
Alors les classes pouvaient
être surchargées, les établissements vétustes, les livres et les matériels
insuffisants et les classes trop froides chacun s’en accommodait.
L’école était la pépinière de
la République et ses pousses se rassemblaient dans la forêt du savoir.
Alors vous me direz que je
vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître.
Voire !
Est-ce qu’une société peut
tenir son rang sans respecter l’école ?
Une Nation peut-elle grandir
et se développer sans donner toute leur place à ses enseignants.
Peut-elle rester elle-même
sans transmettre aux jeunes les règles de discipline et les racines du savoir ?
Au moment où commence ses
premiers pas un gouvernement dirigé par un enseignant et où le ministre de l’éducation
se voit placé aux premiers rangs de la hiérarchie gouvernementale, est-ce trop
demander à toute la classe politique d’ouvrir un débat serein sur la place de
l’école dans la République ?
Charles Debbasch
Doyen honoraire de la Faculté
de Droit d’Aix-en- Provence
Président honoraire de la
Conférence des Doyens des Facultés de droit
Ancien membre du Conseil
d’administration et du Directoire du CNRS