mardi, mars 06, 2007

QUELS CLIVAGES POLITIQUES A LA VEILLE DE LA PRESIDENTIELLE

LA FRANCE A LA VEILLE DE LA PRESIDENTIELLE
QUELS CLIVAGES POLITIQUES ?

La France connaît depuis les débuts de la Vé République un clivage manichéen droite- gauche. Le système à dominante bipartisane est le résultat des modes de scrutin. Pour les présidentielles au second tour, deux seuls candidats restent en lice. Ce dualisme oblige aux regroupements et écarte les petits partis qui avaient fait la loi sous la IVe République. Ce système favorise les jeux de balancier et les brusques mutations politiques. Longtemps favorable à la droite, il a procuré l’avantage à la gauche à partir de 1981.

Pourtant se système s’est progressivement essoufflé. Les électeurs ont montré leur agacement par différents signaux.

Alors que l’on pensait que les majorités parlementaires et présidentielles coïncideraient toujours ,les électeurs ont crée des situations de cohabitation. Au détriment de Mitterrand en 1986, au passif de Chirac après la dissolution ratée de 1997.Par une sorte de revanche sur un système électoral contraignant, les électeurs obligent la droite et la gauche au compromis en créant une situation de cohabitation.

L’élection présidentielle de 2002 est encore plus significative. Les électeurs éliminent du second tour le candidat du PS ;Ils dispersent leurs voix sur de petits candidats ; Cette rébellion permet au FN d'être présent au second tour et oblige la gauche et la droite à réunir leurs suffrages sur le candidat Chirac .La progression fulgurante du candidat Bayrou dans l’actuelle présidentielle est également le signe du rejet progressif par l’opinion du système clanique.

Il est vrai que s’il existe plus qu’un papier de cigarette entre les programmes de droite et de gauche, le ravin qui séparait les deux grands clans politiques s’est transformé en une dunette qui se transforme au gré du vent.

Le transfert progressif des pouvoirs vers l’Union européenne affadit les clivages. L’instauration progressive d’une économie ouverte et régulée par l’euro interdit les virages à angle droit. La folie dépensière de 1981 ne serait plus aujourd’hui possible. Le libéralisme échevelé ne pourrait pas davantage s’instaurer. La mondialisation de l’économie impose des contraintes qui remettent en cause les choix idéologiques. Que pèsent les 35 heures face aux risques de délocalisation?

Les grands débats de société voient s’effriter les lignes de fracture Face à la question de l’immigration , l’opinion est partagée par une ligne qui n’est pas celle de la frontière droite –gauche. L’école n’est plus la propriété de la gauche et les enseignants affrontés au pays réel ne se sentent plus esclaves d’un seul camp.

Les partis eux-mêmes ressentent ces transformations. Les sondages inspirent davantage l’action de leurs dirigeants que leurs programmes politiques. Les électeurs par cette démocratie directe redeviennent les maitres du jeu .A force de coller aux sondages , les partis se ressemblent pour tenter de mieux rassembler.

Et pourtant, dans les propos télévisés, les meetings, les deux grands camps continuent à faire comme si rien n’avait changé. Ils profèrent les mêmes anathèmes, les identiques exclusions, les sempiternelles excommunications. C’est qu’ils tiennent à leur pré carré électoral. La loi électorale les oblige pour survivre de continuer à s’affronter pour mieux dominer. Il suffit de constater les tirs croisés de la droite et de la gauche contre Bayrou. L’essentiel de l’argumentation repose sur l’impossibilité de traduire la troisième voie sur le terrain électoral.

Ce clivage entre ce qui est ressenti par l’opinion comme une division obsolète et la nécessité pour la droite et la gauche de s’opposer pour survivre explique en grande partie le désenchantement de l’opinion face aux grands partis et le recherche confuse et désordonnée d’espaces de respiration politique hors des champs traditionnels.

Nous vivons à l’évidence la fin d’une période politique. Des mutations se préparent qui imposeront un renouvellement profond du paysage politique et, sans doute, une modification de la loi électorale.

Doyen Charles Debbasch