lundi, octobre 05, 2009

LE FAIT DIVERS,LE PRESIDENT?LE JUGE ET LE LEGISLATEUR

LE FAIT DIVERS, LE PRESIDENT,LE JUGE ET LE LEGISLATEUR
Une joggeuse est enlevée et assassinée par un délinquant sexuel qui avait fait l’objet d’une remise de peine et aussitôt la controverse éclate qui touche les trois pouvoirs l’exécutif, le judiciaire, et le législatif.
La réaction de l’exécutif a été immédiate. Nicolas Sarkozy a reçu à la présidence la famille de la victime. Il a "demandé au ministre de l'Intérieur de veiller, au besoin par une modification de notre législation, à une implication plus forte des services de police et de gendarmerie dans la surveillance désormais étroite des condamnés ayant achevé leur peine". Deux ministres se sont également exprimés. Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux a estimé que "l'assassinat de Mme Hodeau aurait pu être évité", jugeant "parfaitement inacceptable que ce criminel sexuel ait été remis en liberté" par les juges d'application des peines. La ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a proposé de renforcer la castration chimique afin qu'elle puisse "s'appliquer pendant l'incarcération, mais aussi après". "La castration chimique ou la prison».
Les magistrats se sont immédiatement défendus de toute erreur commise dans le traitement de ce délinquant. Condamné en 2002 à 11 ans de prison pour le viol et l'enlèvement d'une adolescente de 13 ans, commis en 2000, cet homme avait bénéficié d'une libération conditionnelle en mars 2007, assortie de l'interdiction de rencontrer sa victime et de l'obligation de se soigner.
«Sa peine s'est achevée en novembre 2008 sans qu'aucun incident n'ait été signalé », a précisé une source judiciaire. L'homme était donc libre de ses mouvements, y compris dans la zone où il a commis le crime pour lequel il a été condamné. Le procureur d'Evry a souligné que "rien ne laissait penser" dans le comportement du suspect "qu'il pouvait recommencer" et que la libération conditionnelle était intervenue après un "long processus de réflexion du juge qui le suivait».
Le corps judiciaire s’est indigné d’être mis en cause une fois encore à propos d’un fait divers. Christophe Régnard, président de l'Union syndicale des magistrats a assuré que ses confères ont «appliqué la loi», rappelant par ailleurs que «Rachida Dati, n'a cessé de dire qu'il fallait aménager les peines au maximum pour vider les prisons, et assurer le suivi des personnes à l'extérieur». Emmanuelle Perreux, présidente du syndicat de la magistrature a de son côté regretté d'«entendre Brice Hortefeux faire des raccourcis aussi rapides» et «désigner quelqu'un à la vindicte». La magistrate a rappelé que «les taux de récidive pour les gens qui ont fait l'objet d'un aménagement de peine sont moins importants que pour ceux qui sortent de prison sans aucun suivi». Mais cela ne suffit pas, a-t-elle ajouté, regrettant «un dispositif défaillant dans la prise en charge et la réinsertion, notamment pendant le temps carcéral».Quant à la Ligue des droits de l'homme elle a dénoncé «un nouveau dérapage populiste» du ministre de l'Intérieur. «Suivant avec zèle les traces populistes de Nicolas Sarkozy», Brice Hortefeux a rendu le juge d'application des peines «quasiment responsable» de ce meurtre, estime la LDH.

Quant au pouvoir législatif, il est sollicité pour modifier une fois de plus la législation pour éviter le renouvellement de drames semblables. Michèle Alliot-Marie souhaite que, dans le projet de loi sur la récidive qui doit être examiné en octobre, la castration chimique soit permise après la détention, lorsque le délinquant sexuel est en période de remise de peine ou lorsqu'une obligation de suivi a été prononcée. "Ce sera la castration chimique ou la prison. Ils auront le choix entre l'un ou l'autre", a-t-elle déclaré.

Ainsi, un simple fait divers sollicite les trois pouvoirs de la République.Celà ne doit guère surprendre. Notre société inquiète devant la délinquance réclame plus d’autorité. Son porte parole , l’exécutif, comptable de l’ordre public prend en charge cette revendication. Les magistrats chargés de l’application de la loi ont une mission difficile à remplir. Ils ne doivent pas surcharger les prisons et doivent donc prendre la responsabilité de mettre en liberté les délinquants qui paraissent le mériter.
Quant au législatif, il est sans cesse sollicité pour adapter les textes qu’il vient de voter à des cas particuliers.
Tout ce désordre trouve ses racines dans le trouble de notre société qui souhaite l’ordre et l’explosion libertaire, la rigueur et le laxisme, la protection des victimes et la rédemption pour les criminels.
Il ne faut pas alors s’étonner que des faits divers conduisent à poser des questions de principe et qu’ils obligent à trancher des problèmes de société.
Charles Debbasch