samedi, janvier 30, 2010

L'AFFAIRE CLEARSTREAM,LA VICTIME,LES COUPABLES ET LE PROCUREUR

L'AFFAIRE CLEARSTREAM, LA VICTIME,LES COUPABLES ET LE PROCUREUR



Le tumulte assourdissant qui a entouré le jugement rendu par le Trbunal de Paris le 28 janvier 2010 dans l'affaire Clearstream où s'entremêlent des données juridiques et l'affrontement politique Sarkozy-Villepin trouble la compréhension du dossier au point que l'on en arrive à confondre les victimes et les coupables,Tenons-nous en donc aux simples données juridiques.

LA VICTIME :NICOLAS SARKOZY ET AUTRES

Pour mettre en cause Nicolas Sarkozy et diverses autres personnalités, des commanditaires aidés par des complices ont falsifié des listings bancaires de la banque Clearstream en y ajoutant plusieurs noms dont celui de l’actuel Président de la République. Ont été également visées plusieurs personnalités politiques ayant exercé des responsabilités dans l'industrie, la défense ou au ministère de l'intérieur - Alain Madelin, Jean-Pierre Chevènement, Dominique Strauss-Kahn, Charles Pasqua . Il s'agissait de faire croire à l'opinion publique que toutes ces personnes détenaient des comptes bancaires cachés à l'étranger,Nicolas Sarkozy était principalement visé par la manipulation,L'objectif recherché était de l'exclure de la compétition présidentielle.

L'actuel chef de l'Etat est donc dans l'affaire Clearstream la victime principale .C'est lui que des manipulateurs ont voulu atteindre par la falsification et la manipulation.On aurait tort d'oublier cet aspect essentiel de l'Affaire.



LES COUPABLES CONDAMNES PAR LE TRIBUNAL

Deux condamnations principales touchent les responsables de la falsification des listings ou de leur divulgation.

Jean-Louis Gergorin ,l'ancien vice-président exécutif d'EADS, corbeau de l'affaire, a été condamné à trois ans de prison, dont 21 mois avec sursis, et 40.000 euros d'amende pour dénonciation calomnieuse, usage de faux et recel d'abus de confiance.Le parquet,pour sa part, avait requis trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, et 45.000 euros à son encontre.



Imad Lahoud, le mathématicien falsificateur des listings Clearstream, a été condamné à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, et 40.000 euros d'amende pour complicité de dénonciation calomnieuse, faux et usage de faux et recel d'abus de confiance.

Pour sa part,le parquet avait requis deux ans de prison, dont six mois avec sursis, et 45.000 euros d'amende à son encontre pour dénonciation calomnieuse, faux et usage de faux et recel d'abus de confiance.



LA RELAXE DE DOMINIQUE DE VILLEPIN

La Justice avait la difficile tache d’établir si Dominique de Villepin avait simplement souhaité faire établir la vérité des faits ou s’il avait, au contraire, appuyé sur l’accélérateur pour mettre en cause Nicolas Sarkozy.

L'ancien premier ministre bénéficie d'une double relaxe.

Le tribunal estime d'une part que la preuve n’est pas rapportée à l’encontre de Dominique de VILLEPIN de l’existence tant d’une instruction, donnée en connaissance de cause, de commettre le délit de dénonciation calomnieuse dont il aurait été l’instigateur, que d’une abstention d’empêcher la réitération de la dénonciation qu’il aurait su calomnieuse, susceptible de constituer un acte de complicité .

D'autre part, le tribunal estime qu'il résulte de l’information et les débats que Dominique de VILLEPIN ignorait jusqu’au 15 octobre la provenance exacte des documents ; que la preuve n’est pas rapportée qu’il les ait eus matériellement en sa possession ; qu’il n’est pas établi que Dominique de VILLEPIN ait concouru par l’instruction de saisir le juge Renaud VAN RUYMBEKE, à la remise à ce magistrat des documents de provenance frauduleuse au travers des envois des 3 mai, 14 juin, 20 août et 4 octobre 2004 ; qu’il s’ensuit que le délit de recel n’est pas constitué à son encontre.

Il convient en conséquence de renvoyer Dominique de VILLEPIN des fins de la poursuite engagées à son encontre du chef d’une part de complicité d’usage de faux et d’autre part de recel de vol et d’abus de confiance

Le procureur pour sa part avait conclu à la responsabilité de Dominique de Villepin estimant que l'on avait affaire à une"manipulation complexe d'une ampleur exceptionnelle… l'intrication délibérée du vrai et du faux, l'association réfléchie de faits réels et de calomnie". Les acteurs de cette affaire entretiennent tous "un rapport altéré à la vérité ".



L'APPEL DU PARQUET

Alors que Nicolas Sarkozy avait manifesté son intention d'en rester là, le Procureur de la République a immédiatement relevé appel du jugement entraînant des réactions véhémentes de l'ancien premier ministre. Pourtant, il s'agit d'une procédure habituelle dans des instances où plusieurs protagonistes sont poursuivis simultanément. Il est difficile en appel de saucissonner le dossier.L'appel du Parquet doit permettre un réexamen global de l'Affaire.L'appel du parquet est une décision évidente, selon le Procureur. "Je n'ai pas changé d'opinion, le dossier apporte la preuve irréfutable qu'à la mi-juillet 2004, M. de Villepin savait que les listings étaient faux. Il n'y a pas eu de stratégie concertée avec l'Elysée. Ne retrouver devant la cour d'appel que les seuls Gergorin et Lahoud, c'était un procès tronqué. Je suis cohérent, j'ai une conviction, c'est la conception que j'ai de mon métier."



Ainsi, malgré la personnalité des protagonistes, cette Affaire se situe dans le droit commun de la procédure pénale.



Charles Debbasch