mercredi, octobre 10, 2007

L'AFFAIRE EADS AIRBUS

AMBIGUITES SUR LE ROLE DE L’ETAT
L’AFFAIRE AIRBUS


L’affaire EADS est à double tiroir. Il s’agit tout d’abord de savoir si les actionnaires et notamment le groupe Lagardère ont cédé leurs actions parce qu’ils connaissaient les retards que subissait le programme de l’Airbus A 380 et les conséquences qu’ils auraient sur le cours du titre. Ce serait alors un grave délit d’initiés.

Mais , l’affaire a un second volet encore plus sérieux. Cette participation dans EADS a été rachetée par un organisme d’Etat, la Caisse des dépôts et Consignations .Il faut alors se demander si, d'une façon ou d'une autre, l'État a incité la CDC à investir dans le groupe EADS, au printemps 2006, à hauteur de 600 millions d'euros, en rachetant une participation de 2,25 % sous forme d'obligations au groupe Lagardère. alors même qu'il était informé des difficultés du programme A 380 et pouvait à ce titre anticiper la chute du cours. Dans ce cas , l’Etat se serait rendu complice du délit d’initiés causant un grave dommage aux finances publiques, la Caisse des dépôts enregistrant à ce jour une moins-value potentielle de l'ordre de 200 millions d'euros.

Il ne s’agit pas ici de se prononcer sur les responsabilités : c’est le rôle de la justice, mais de tirer les leçons de ce dossier.

Il convient de souligner qu’en tout état de cause cette affaire illustre un singulier dysfonctionnement de notre machine administrative. Le ministre des Finances de l’époque prétend ne pas avoir été informé du dossier, la Caisse des dépôts ayant agi en toute indépendance. Cela peut être vrai formellement. Mais, en fait , tout connaisseur des réalités administratives sait que les choses ne se passent jamais ainsi et que la technostructure se consulte et délibère avant de prendre une décision de cette importance. On découvrira à l’évidence que des contacts ont été pris et que des échanges divers ont eu lieu. Ce qui pose déjà problème et illustre la trop grande indépendance de notre establishment administratif à l’égard du pouvoir politique .Il est évident que si ce dossier avait été traité au grand jour, on aurait évité les suspicions qui se font jour à présent.

Cette affaire illustre aussi l’espèce de concubinage qui existe entre l’Etat et les grands groupes industriels. Il est normal que des passerelles existent entre le privé et le public mais, pour ne pas qu’elles se transforment en passoires génératrices de compromissions, il faut que des règles claires définissent ces rapports. Il faut passer ici de l’opacité à la transparence.

Car il ne faudrait pas surtout que l’on tire des conséquences absolues de cette affaire en condamnant toute intervention de l’Etat. Il ne faut pas en effet oublier que c’est grâce à l’Etat que le programme Airbus a vu le jour et s’est développé.

Charles Debbasch