dimanche, novembre 21, 2010

DES JURES POPULAIRES EN CORRECTIONNELLE ?

FAUT -IL INTRODUIRE DES JURES POPULAIRES EN CORRECTIONNELLE ?

Lors de son intervention télévisée du 16 novembre le président de la République a rappelé son intention de "faire entrer des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels", et aux côtés des juges d'application des peines. . Le 9 septembre, peu après le meurtre d'une joggeuse par un homme déjà condamné pour viol, il indiquait être favorable à l'entrée des jurés en correctionnelle.
I-LES MOTIVATIONS
-LUTTER CONTRE LE LAXISME DES IUGES
L'opinion publique est troublée par l'insécurité. Les syndicats de police s'indignent de voir remettre en liberté des truands qu'ils ont mis longtemps à pister. Les juges seraient trop laxistes face à la délinquance. C'est ce qu'exprime . Brice Hortefeux dans les colonnes du Figaro Magazine : "Est-il normal aujourd'hui que des assassins ou des violeurs, condamnés par une cour d'assises, puissent sortir de prison avant la fin de leur peine parce que des magistrats professionnels l'ont décidé ?
Dés lors l'insertion de jurés populaires permettra de mieux tenir compte de la volonté de l'opinion publique d'endiguer la délinquance. Les auteurs de la proposition imaginent que les jurés populaires seront plus sévères que les magistrats
Cette argumentation n'est pas entièrement convaincante. Il serait possible de mieux assurer la formation des magistrats pour qu'ils hiérarchisent mieux la protection des victimes et celle des coupables

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- LUTTER CONTRE LE CORPORATISME JUDICIAIRE
Le repli de la magistrature sur elle-même provoque un phénomène de solidarité corporatiste qui ruine souvent l'usage des voies de recours. Dans l'affaire d'Outreau-qui était de l'ordre criminel- c'est la présence des jurés qui a permis de mettre fin à l'erreur judiciaire alors que les magistrats avaient couvert les erreurs commises par leurs collègues. La présence de jurés en correctionnelle peut avoir pour effet d'introduire dans la magistrature l'air frais de l'extérieur qui lui manque.
On notera cependant que l'argument du corporatisme est utilisé dans un but inverse de celui du laxisme. Il s'agit ici de rétablir des droits, de protéger des innocents.et non de sévir davantage.

II-LA MISE EN ŒUVRE
-LES PROPOSITIONS GOUVERNEMENTALE
Une concertation pour l'instauration de ces juré, devrait commencer «dès le début 2011».
Le garde des Sceaux Michel Mercier suggère que le projet de placer des jurés populaires auprès des magistrats professionnels dans les tribunaux correctionnels soit réservé au moins aux juridictions d’appel. Cette présence de jurés ne s'appliquerait pas à tous les délités mais seulement aux plus graves d'entre eux.
Chez le juge d’application des peines (JAP), qui décide des aménagements de peine de prison, et notamment des libérations conditionnelles, «on peut très bien imaginer un assesseur qui soit président d’une association de victimes ou président d’une association de probation», a précisé. le ministre.
-LES REACTIONS
Pour Marylise Lebranchu, députée socialiste et ancienne ministre de la justice,: "Il s'agit d'un appel à la défiance à la justice actuelle par un réflexe populiste; "Sur le principe, pourquoi pas !", déclare l'ancienne garde des sceaux Elisabeth Guigou. "Il faut tendre à un rapprochement des citoyens et de la justice," admet Benoist Hurel, "mais il faudra recruter et former de très nombreuses personnes",ajoute-t-il.
Et chacun d'insister sur le coût et la lourdeur de la mise en place d'une telle réforme;

La proposition d'instituer des jurés en correctionnelle, si elle peut être utile, ne suffira cependant pas à combler le fossé qui s'est ouvert dans les relations entre le peuple et la justice.

Il faudra réfléchir plus profondément à la place de la justice dans nos institutions et aux moyens de mieux ouvrir la magistrature sur la société.


Charles Debbasch