PRESIDENTIELLES LE RETOUR DES EXTREMES
La
bipolarisation de la vie politique autour des deux principaux candidats (Hollande
28,63% ; Sarkozy 27,18%) générée par le système électoral ne doit pas
occulter les transformations l’intérieur de chaque camp caractérisées par le retour
des extrêmes.
JEAN-LUC MELENCHON ET
LE FRONT DE GAUCHE
Le pari socialiste s’était
progressivement cantonné dans un langage réformiste. Jean-Luc Mélenchon s’est
fixé comme objectif, avec le Front de Gauche, de rassembler les laissés pour
compte du système, d’être la voix des sans voix. Labourant tout à la fois les
terres du parti communiste et celles des indignés, servi par des qualités de
tribun impressionnantes, il a réussi à fixer sur son nom 11,10% des suffrages soit
près de 4 millions d’électeurs. C’est un succès.
Selon Opinion Way, Mélenchon a d’abord attiré les jeunes avec 16%
parmi les moins de 25 ans. Il a obtenu les suffrages de 15% des ouvriers et de 14%
des « professions intermédiaires ». Le Front de Gauche a été particulièrement soutenu
par les salariés du secteur public (14% contre 12% de ceux du privé)
La stratégie de Mélenchon pour l’avenir est claire. Il souhaite
faire battre Sarkozy. Ce qui signifie qu’il appelle implicitement à voter pour
Hollande dont il se garde bien pourtant de
citer le nom. Il entend en effet peser sur la gauche en contraignant le PS à
épouser ses positions radicales. Sa gauche à l’évidence n’est pas celle de Hollande
ou de Guy Mollet, c’est une gauche révolutionnaire préférant le combat au
débat, la grève à la négociation, la lutte à la base plutôt que le compromis au
sommet. Ce sera un partenaire difficile à gérer pour François Hollande ;
MARINE LE PEN ET LE FRONT
NATIONAL
Avec 17,9% des voix Marine Le Pen remporte un indéniable succès.
Par rapport à 2007, le Front national gagne 2,6 millions de voix. Par rapport à
2002, il est aussi en progrès puisqu’il obtient 6 421 802 voix là où Jean-Marie
Le Pen et Bruno Mégret en totalisaient 5 478 739 le 21 avril 2002. Le Front National
réalise des scores à deux chiffres pratiquement partout, à l’exception du
centre de Paris et des grandes villes. Il rassemble des Français inquiets
devant le changement qui recherchent la protection d’un Etat fort et la défense
de la Nation.
Plutôt que de se rallier à la droite qui n’a pas été
reconnaissante dans le passé, la stratégie de marine le Pen est plutôt de
pousser Nicolas Sarkozy à l’échec. Elle peut alors imaginer que l’UMP implosera
et que, sur ses décombres, naîtra une nouvelle droite qui sera obligée de
composer avec le Front National.
Un Front national nouveau émergera alors un peu à la manière,
hier, de Forza Italia en Italie. Un Front National civilisé et républicain mais
fidèle aux valeurs de la droite deviendra alors une composante essentielle pour
une reconquête du pouvoir par les forces hostiles à François Hollande.
Ainsi les deux partis dominants du système le PS et l’UMP
sont-ils tous deux attaqués à l’occasion de ces présidentielles qui sont en voie
de marquer un tournant important dans la recomposition de la vie politique nationale.
Charles Debbasch